Toujours appareiller ! D’horizons en escales,

Bourlinguer à vau l’eau de mon statique espoir.

Tout sentir, tout aimer, tout visiter, tout voir,

Tout prendre ci là-bas des douceurs estivales,

 

- Et des rudes hivers oublier les périls…

D’un paysage à l’autre ancrer mes songeries,

Traverser Zanzibar, Calais, les Asturies,

Coudoyer l’océan, les déserts, les terrils…

 

J’embarque quand je veux, j’accoste où bon me semble.

Oui, je voyage en chambre, en huis clos, et alors ?

Ça vous déchante ? Eh bien, cherchez vos pass eports

Moi, sans bouger, je vogue, vole ou marche l’amble...

 

Plus douce est la partance aux vieux quais virtuels,

Que transit ou charter du touriste grégaire.

Je déambule dans ma bulle en solitaire,

Mes confins sont sans fin, mes bords perpétuels.

 

De mon long cours assis, nul ne connaît le terme,

Et je ne saurais dire en quel port j’ai mouillé.

Mon habitacle a son hublot déverrouillé

Que le souffle du rêve à loisir ouvre ou ferme.

 

J’ai cueilli le bleuet des vents au Groenland.

Je flâne à Singapour et je valse à Venise...

Du pôle à l’équateur, j’atterris sans valise.

- A l’ombre du Pinau je suis de Samarkand. -

 

Aucun sillage ne balafre mon grand large.

Il fait si loin ici… Partir est un faux deuil.

Clandestine ès libris, passagère en fauteuil,

Avec pour no man’s land, d’un bel atlas, la marge.

 

Françoise Plain©