jean-michel mayot
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ROYAUME
DE LA NUIT
Densité de la
perception !
Constamment
de la lumière, des sons, des odeurs, un vent frais ou une douce chaleur nous
enveloppent, nous pénètrent, nous transforment.
Quelle
est la réalité de tout cela ? La lumière : une pluie de particules
joliment appelées photons parcourent l’univers en tout sens. Chaque source
d’énergie lumineuse, soleil ou modeste flamme de bougie, lance ses gerbes
jusqu’à l’épuisement de sa matière. Mais où la lumière devient-elle visible,
où, en quelque sorte, prend-elle conscience d’elle-même ? Pour que la
lumière existe ne lui faudrait-il pas un œil branché sur un cerveau ?
Sans ce dispositif la lumière ne serait-elle pas qu’un flot de particules
opaques, aveugles, un songe ?
Sans un
œil qui s’ouvre l’univers ne serait-il pas qu’un songe de sons, d’odeurs, de
coups et de frôlements, un écho ? Privée de lumière la perception du monde
par un corps vivant ne serait-elle pas un alphabet dispersé et profus ?
Alphabet d’énergies étonnamment diverses et semblables dont le bombardement
alimenterait la source d’un langage qui ferait qu’un monde n’existe qu’à l’endroit
précis où ces énergies se focalisent ?
Dotée de
lumière la perception du monde s’enrichit de l’énigme de sa visibilité :
qu’est-ce qui du monde demeure dans la nuit ?
L’éternité ?
Le poème
la réclame.
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Le goût de pluie
L'odeur de neige
L'œil ouvert
Des vitres
Cette eau qui passe
Et nos pensées
Cette eau que berce
La lumière
Et demain
Demain déjà qui dort
Dans tes yeux
Et s'agite à naître
Demain
C'est demain
Que je te vois
Vivre cent fois
D'un coup
Effacer
Le goût de pluie
L'odeur de neige
Les gouttes de sang
Des jours
Le goût de pluie
L'odeur de neige
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Je voudrais
Un poème qui soit un arbre
Enfant qu'on grimperait
Je voudrais
Un poème qui soit une gorge
Douce de la douceur
D'une source retrouvée
Un poème
Qui soit une maison
Avec de hautes horloges de bois
Et des souvenirs de greniers
Un poème qui soit des mains
Pour y mettre
La rosée
Je voudrais un poème
Comme un papillon
Je voudrais un poème
Comme on a des frissons
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Invisible
Au vent
Entre toit
Et lune
Araignée
Secrète
De la chair
Au sang
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La porte-fenêtre du
balcon grince sous le léger vent de mai.
Un peu de
muguet lentement jaunit dans un vase au cou étroit taillé en biseau. Cristal
trop blanc, feuilles trop vertes, pauvres clochettes arrachées au
silence : es-tu seul à les entendre ?
Plus
d’une fois tu as volé leur parfum, parfum de voyage, parfum à croire.
L’impatience !
Comment
dit-on muguet en allemand, en roumain, en turc ?
Quel
monde grogne au profond de tes viscères, quel tumulte étroit, quel étranglement
du savoir !
Des
gazouillis d’oiseaux comme un édredon de plumes recouvre l’ancienne fatigue, la
lutte avec les dunes, la mer mauvaise et grise.
N’est-ce
pas le silence, la chaleur naissante qui t’a enlevé à l’hiver où tu te tenais
comme un ravissement d’être arbre sous la neige ?
Qui a
brisé les digues, livré les cloches à la furie, le vent au désespoir ?
En vain
parmi les galets rouleront tes souvenirs, ton image sans miroir t’emporte plus
loin, plus loin que les grains, plus loin que l’amandier, plus loin.
Ne
cherche plus parmi les sables. Tes pas le vent les a dispersés, versés à la
mémoire immonde.
Tu ne
peux t’approcher de la brisure éclatante du monde, de l’absolu ailleurs, du
gouffre qui appelle.
Entends
comme chantent les cerisiers, comme roucoulent les ramiers, ramasse ton image
dans les flaques, il est temps.
Il est
temps.
Dans l’eau de l’étang
Danse la
si jeune lune
Le singe y sourit.
Jean-Michel MAYOT ©
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